DIAGNOSTIC VULNERABLE
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DIAGNOSTIC LITTÉRAIRE : FICHE DE SYNTHÈSE
Vulnérable, Harinavalona RAVELOARISOA
- Le personnage principal est attachant et sa personnalité suffisamment fouillée pour permettre au lecteur de s'identifier. Une bonne base. Néanmoins, il a encore besoin d'être travaillé pour être tout à fait convaincant.
- Les quatre premiers chapitres sont entièrement à revoir. Que ce soit le style, la présentation de l'intrigue, la cohérence... rien ne tient vraiment la route. Le manuscrit s'améliore par la suite.
- D'importants problèmes d'orthographe, mais surtout de conjugaison sont à régler.
- Il y a trop de décalage entre, d'un côté, le style naïf et une certaine immaturité du personnage et, de l'autre, le contexte dans lequel se déroule l'histoire, à savoir l'université. La cible doit être mieux définie et le manuscrit retravaillé en conséquence.
DIAGNOSTIC LITTÉRAIRE : ANALYSE DÉTAILLÉE
Vulnérable, Harinavalona RAVELOARISOA
1 - Un personnage intéressant et riche mais qui doit encore être développé
Le personnage de Bérénice est intéressant. Cette jeune fille maladroite, un peu balourde, mal à l'aise dans son corps et face au monde est touchante. Et son malaise souvent bien décrit. Certaines scènes sont presque amusantes comme ce moment où à deux reprises elle lâche ses affaires en heurtant le même garçon. Même si le récit a une dominante dramatique, il serait intéressant de développer le côté parfois comique du personnage. Elle s'y prête parfaitement bien et le contraste entre « terreur » et humour pourrait enrichir le livre d'une dimension supplémentaire. Lorsqu'elle commet des bévues, elle a presque un côté Bridget Jones. À explorer !
Son rapport difficile aux autres demanderait lui aussi plus de développement. Tatiana, Olga, Ninon et Diana la terrifient. Mais tout cela manque d'illustrations. Il faudrait davantage mettre en scène le harcèlement dont elle est victime et développer par exemple les passages de l'exposé ou du shopping. Rendre ces moments plus cruels. Pareil pour le personnage de Maël, sympathique, mais qui disparaît du récit sans que l'on sache pourquoi. Ne serait-il pas intéressant d'en faire lui aussi un « bourreau », sa gentillesse pourrait être suivie d'une trahison... (un exemple : il pourrait attendre que Bérénice s'attache avant de lui avouer qu'il a quelqu'un dans sa vie)
Le regard qu'elle porte sur le monde et sur ses camarades pourrait lui aussi être approfondi. Elle pourrait être plus désenchantée, critique ou ironique qu'elle ne l'est. Elle gagnerait sans doute encore en personnalité et deviendrait plus attachante. Attention toutefois à ne pas perdre de vue la nature du personnage. La scène dans laquelle elle aborde Maël et la façon dont celui-ci la repousse devrait l'anéantir, l'humilier au plus haut point. Or, elle fait preuve d'une audace et d'un sang-froid inhabituels et le rejet semble glisser sur elle trop facilement. Il faudrait revoir ce passage.
Dans l'ensemble l'évolution du personnage sonne juste, et la progression du déroulement fonctionne bien : les scènes de rêves sont de plus en plus effrayantes (celle de la scène de
classe avec les personnages encapuchonnés est particulièrement réussie), la fête d'Halloween marque un pic émotionnel et la consultation chez le psy arrive juste au bon moment, ni trop tôt ni trop tard. Autres éléments intéressants : les deux personnages imaginaires et la petite voix de la conscience qui intervient parfois. Autant d'éléments à conserver, mais aussi à affiner.
- Une entrée en matière qui passe à côté de son objectif
Malheureusement, le rythme est parfois plombé par des détails insignifiants. Surtout au début, une partie qui doit pourtant être particulièrement soignée puisque c'est une porte d'entrée pour le lecteur. Le moment où il va décider de poursuivre ou non sa lecture. Or ici cette introduction semble interminable. Rien n'est posé : aucun enjeu dramatique, aucune personnalité, un flou intégral sur l'identité du personnage et pas de décor planté ! Sans compter le style extrêmement maladroit. Les quatre premiers chapitres concentrent pratiquement à eux seuls les pires défauts du texte. Le texte est si naïf, le style si heurté et les détails si insignifiants que l'on a l'impression de lire le journal intime d'une petite fille sans imagination. Quelques exemples de la banalité du propos : « Nous avons le choix entre le centre commercial appelé la Toison d'Or ou celui de Quetigny. Mon frère choisit Quetigny parce qu'il est le plus proche. » ; « Faire les courses a été finalement plus long que prévu et plus coûteux que jamais. J'ai essentiellement pris des surgelés, des céréales et du lait, des biscuits de préférence au chocolat, quelques fruits et des boissons. Nous sommes sortis du centre commercial vers dix-huit heures. » ; « Je me suis levée de bonheur ce matin, je pense que ma mère aurait été ravie de l'apprendre. Je prends donc mon temps pour prendre mon petit déjeuner... J'ai le choix entre prendre le bus ou le tram pour me rendre à la faculté, je choisis le tram parce qu'il est le plus rapide aussi bien au niveau du trajet que du temps d'attente dans les arrêts. Je décide de prendre de l'avance ce qui me conduit à arriver sur les lieux une demi- heure plus tôt. » ou encore, comble de la Lapalissade : « Les étudiants de lettre n'occupent qu'un grand bâtiment, celui des sciences humaines et lettres. » L'auteure doit se rendre compte de la futilité et de la vacuité de ces premiers chapitres. Il va falloir les effacer et les reprendre entièrement. Poser les lieux, la situation, montrer plus subtilement les faiblesses de Bérénice, enclencher une action et, surtout, raccourcir. Il serait tellement plus
efficace de débuter par la scène de l'antiquaire pour embarquer immédiatement le lecteur dans l'atmosphère du livre (l'installation de Bérénice pouvant être racontée ensuite, rapidement, à la manière d'un flash-back).
- Quelques incohérences et une intrigue parfois maladroite
À propos justement de cette scène chez l'antiquaire. Il y a ici clairement un problème de cohérence et les éléments de l'intrigue semblent avoir été posés à la va-vite, maladroitement. Il est impossible d'y croire une seconde. La seule chose qui arrive à Bérénice c'est l'impression d'être observée. Rien de grave. Un malaise qui peut parfois, sans raison, saisir chacun de nous. À cela s'ajoute une remarque de l'antiquaire au moment où elle feuillette un livre : « Intéressant ». Remarque on ne peut plus banale. C'est sur ces deux éléments que se fonde le mystère : « Malgré moi, je n'arrête pas de penser à ce que l'antiquaire avait dit :
« intéressant » qu'est-ce que ça veut dire ? Et surtout quel est le rapport avec moi ? Par ailleurs, je n'arrive toujours pas à expliquer la présence d'une troisième personne dans la boutique. » Quelle troisième personne ? Pour faire naître et partager le trouble, il faudrait que quelque chose de vraiment étrange se passe. Un incident concret mettant vraiment en scène un personnage mystérieux. Ici c'est tiré par les cheveux. Même chose lors de la deuxième visite. Elle aperçoit simplement une silhouette à l'extérieur. De là elle tire la conclusion qu'elle est suivie, épiée. Il faut mettre en scène cette « filature », multiplier les visions pour faire naître cette obsession. Tout cela est trop léger et sonne faux. La troisième scène en revanche devient plus concrète, il se passe quelque chose, même si cela reste encore à travailler. Introduisez cette tension dès le départ pour donner de la crédibilité et de la tenue à l'histoire.
Une réserve également à propos de l'hôpital. Tout cela se passe trop vite, trop simplement. Un internement est une épreuve. Il est essentiel de décrire cela. Et la guérison se passe de manière trop instantanée, presque de façon miraculeuse. Il faudrait introduire plus de progression, de nuances, de complexité. Cet épisode devrait avoir plus de place dans le roman.
- Des efforts à faire sur l'orthographe et la conjugaison
Le manuscrit contient trop de fautes, de maladresses et d'incorrections qu'il faudra corriger.
- Au niveau de l'orthographe : certains mots récurrents sont systématiquement mal orthographiés. C'est le cas par exemple de rez-de-chaussée que l'on retrouve sous la forme
« ré-de-chaussé » ; une allée orthographiée « aller » ou encore évier qui devient ici « levier ». L'auteure devrait songer à travailler avec un dictionnaire pour éviter ce type d'impairs. Il y a par ailleurs, un certain nombre de fautes d'accord du participe passé. Tout cela pourra être arrangé avec une relecture attentive.
- Mais le gros problème réside dans la conjugaison : le texte alterne sans cesse entre le présent et le passé, souvent au sein d'une même phrase. Par exemple : « Je reste là, perdue dans mes pensées, puis la fatigue a eu raison de moi et je retourne me coucher. », alors qu'il faudrait écrire « a raison de moi ». Pourquoi ce saut soudain dans le passé ? Là encore, une relecture attentive devrait éviter ce type d'erreurs. Surgissent aussi d'autres confusions dans l'accord des temps : « Super, moi qui pensais qu'on va passer » est incorrect. Il faut écrire « qu'on allait passer ». Autre souci, le manque de connaissance de l'emploi du subjonctif. Des phrases comme « C'est normal que je dors encore » ou « Je suis soulagée que tout ça s'est produit pendant le week-end sont elles aussi incorrectes et doivent être remplacées par : «... que je dorme encore » et « que tout ça ce soit produit... ». Il faut faire un gros effort pour apprendre à maîtriser les règles de la conjugaison.
- Il faut noter aussi ça et là des maladresses de langage. Au point que le texte semble parfois avoir été écrit par un enfant. Par exemple : « Alors je ne peux pas m'empêcher de faire le lien avec mes vêtements. Je me dis que peut-être moi je pense porter des vêtements mais eux ils me voient porter un sac à patate. » n'a pas grand sens. Autre exemple, même problème :
« Depuis l'apparition de l'antiquaire, du moins je suppose qu'il s'agit de lui, j'ai pensé que c'était lui, ce qui me parait logique puisqu'il veut sans doute savoir si je ne suis pas en train de lui voler. » !
En revanche, à partir du chapitre 5 le style devient plus fluide, plus dynamique et les maladresses se font plus rares.
- Dernier point, les répétitions. Elles sont plutôt nombreuses et souvent dans la même phrase. Exemple : « Après avoir regardé le numéro de ma place sur une affiche, je prends place. » Là encore une relecture attentive devrait en venir à bout.
- Quelle est la cible ?
Il semble y avoir un gros décalage dans le livre. Bérénice semble faire preuve au quotidien d'une grande immaturité. Ses relations avec sa mère, avec ses « camarades », sa façon de s'exprimer, son univers intellectuel... Tout semble décrire une fille de moins de dix-huit ans. Quinze ans peut-être... Il est difficile de croire qu'elle est étudiante à l'université. Un exemple frappant : quand elle aborde Maël en cours et qu'ils s'échangent des petits mots, ses deux premières questions sont « Comment tu t'appelles ? » et « Tu as quel âge ? ». Ce ne sont pas vraiment les premières questions que l'on pose pour aborder quelqu'un lorsqu'on a 18 ou 19 ans.
Cette impression est renforcée par la simplicité et la naïveté du style. Ce qui amène à deux remarques :
- Ce roman n'est pas destiné à un public adulte mais à des adolescents. Est-ce la volonté de l'auteure ?
- Dans ce cas, il est souvent préférable que le personnage principal ait le même âge ou presque que le lecteur pour permettre l'identification. Ce qui amène à penser que Bérénice devrait être une collégienne ou une jeune lycéenne plutôt qu'une étudiante. Compte tenu de sa personnalité enfantine, il n'y aurait pas grand-chose à changer à son attitude. En revanche, cela implique de revoir les éléments de contexte : peut-être un nouveau lycée (lieu plus propice au harcèlement), un isolement qui peut se produire au sein même de sa propre maison (cela permettrait d'étayer le personnage de la mère, un peu faible), voire un choc initial qui expliquerait mieux ses failles et son basculement dans la dépression (la disparition du père ? Qui n'est ici curieusement jamais abordée).
PLAN D'ACTIONS
Il y a des éléments intéressants dans ce texte et une bonne progression dramatique. Mais pour qu'il soit vraiment abouti, il reste encore beaucoup de travail.
- Il faut impérativement s'interroger sur la cible et rédiger le texte en conséquence. La solution du rajeunissement de l'héroïne semble la plus cohérente et celle qui impliquerait le moins d'aménagements.
- Tout en conservant l'essentiel des éléments exposés, il est nécessaire de pousser plus loin la personnalité de Bérénice. Une piste serait d'illustrer davantage ses difficultés, ajouter des scènes qui la relient au monde, tant dans le registre drôle que dramatique. En revanche ne pas en faire plus sur ces terreurs et ses visions, ce serait de trop.
- Revoir les premières apparitions de la femme à la capuche et bâtir les angoisses de Bérénice sur des faits concrets. Se mettre à sa place et imaginer ce qui peut vraiment faire naître la peur.
- Développer et rallonger la scène de l'hôpital en y introduisant plus de souffrance, de dramaturgie. La guérison doit être progressive pour être crédible.
- L'auteure doit lire et relire son texte pour éliminer les fautes, répétitions et maladresses. Les erreurs systématiques de conjugaison semblent en revanche venir d'un manque de maîtrise des règles. Il serait bon de se faire aider pour une correction du manuscrit.